1

 

Sens-tu le courant d’air

quand tomber encore

nous garde aller ?

À fond dans

l’habitude dans

refuser ou non

la norme de l’abandon

du que faire maintenant

avec bienveillance

et le meurtre lent

de l’hésitation —

c’est limite, fatigant.

 

Je m’ennuie de mes dents

de lait, de saigner

quand je trébuchais

sur rien d’autre que mon élan

quand la poussière collée au sang

donnait aux galles un relief

que je grattais du bout des ongles

presque sans les arracher.

 

Aujourd’hui mes mots blessent

du même souffle soigne la plaie

et mes poumons épuisent

les ballons de fête.

 

Entre calme du lac

et guerre totale

 

le deuil sans fin, le deuil normal

jusqu’à ne plus entendre

jusqu’à ne plus rien voir :

 

la rumeur grise de nos feux hors de contrôle

les guenilles qui sèchent au soleil de midi

les freins qui nous lâchent sur le chemin du retour

le muguet de personne au bord de la clôture —

 

la violence

du monde

suspendue

 

le reflet

d’une lame

imprévue

 

à l’ombre de l’éclosion

quand le jour recommence

avec lui je respire

encore je respire

 

tremblant semé

au fond de ton pouls.

 

 

2

 

Notre maison ne sera jamais propre

 

Nous nous porterons malgré tout.

Nous portons la mort de nos pères, de nos ami.es

des vies jamais vécues, nous portons des objets

et des souvenirs pliés pour les ranger quelque part.

Quelque part à l’extérieur de nos corps.

 

Nous avons des maisons

et des remises derrière les maisons.

 

Nous portons un nom

que certains reconnaissent

que d’autres oublient.

 

Il y a des fleurs pendues

aux cadres de nos fenêtres.

 

Tout est grave maintenant,

mais rien n’est grave finalement.

 

Nous portons nos cernes

couché·es près du tremble

et des vinaigriers.

 

Auprès de la molène, l’amarante, le sumac

et du beau gâchis des fruits tombés.

 

Donnant nos paroles

nos voeux, nos mensonges

nous tenons au fond à ce qui nous échappe

comme les rigoles, les rivières, les fleuves

nous enveloppent.